Theus au cœur enchevêtré,
Nos deux cœurs sont intranquilles, c'est ainsi. Parfois, je lis tout de travers, ta poésie, tes silences, ton inquiétude pleine d'humour que je vois comme une inconstance. Je décrypte tout à travers le filtre d'une douleur ancienne.
Je me suis forgé une carapace. Un peu comme toi. Une cote de mailles invisible, aux couleurs du jour. Mon armure est faite d'action à tout prix et de plongée dans l'éclat du monde. C'est toujours si facile de se fuir. Ta protection n'est pas de la même étoffe. Ta douleur est plus vive, et lève encore en toi une rage diffuse, un désir de vengeance. Theus, tu ne t'es pas libéré de tes fers. Avoue que tu n'es pas facile. As-tu toujours été ainsi ? Tu me rappelles une ancienne Ada qui avait du chagrin.
J'aime
- ta tête endormie sur ma poitrine
- nos silences dans la bibliothèque de bois ovale
- nos pas lents dans les musées
- ta silhouette longiligne, au loin
- tes blagues stupides
- ta sensibilité à fleur de peau
- ton caleçon rose
- la musique que tu m'envoies
- tes encouragements
- tes larmes invisibles
- ton amour pour Giacometti
- tes chaussettes sales que j'ai enfilées dans le tram
- toi si content devant un kalte Schocki
- notre sensualité pleine, irradiante
- ton premier baiser du matin
Je déteste
- le bircher muësli spongieux que tu adores
- tes blagues stupides sur la plastique des femmes
- ton indécision (qui me rend indécise)
Aujourd'hui ma grand-mère adorée était avec moi. Toute la journée, son spectre tranquille et souriant m'a accompagnée. J'ai versé des larmes d'émotion. Il y a peu d'êtres sur Terre que j'aie autant aimé. Elle savait me rassurer.
Tu étais l'élastique noir dans mes cheveux, les relevant en une queue de cheval. Bien sûr je t'ai senti. Comme une caresse dans ma nuque. J'ai plusieurs fois passé ma main dans mes cheveux, ajusté ma coiffure, juste pour vérifier ta présence. Caresser le fin ruban et te sentir sous mes doigts me réconfortait.
Je n'imaginais pas que déferlerait cet ouragan de tendresse.
Ada
Tendresse et patience, garants de l'amour absolu ...